— Ah ! ne parle pas de Prascovia ! s’écria la jeune comtesse ; c’est une horreur cette femme-là, et j’espère ne jamais la revoir. Imaginez-vous, mes braves, — j’ai aujourd’hui dix-neuf ans, — que voilà trois ans que Prascovia a épousé Samaïlof, et que depuis ce temps-là on me traite chez moi, dans mon propre château, comme le dernier des moujiks. Prascovia trouve que ma jeunesse fait tort à son âge mûr, et s’en venge sur moi par tous les petits moyens que peut employer une femme méchante. Moi qui étais habituée à commander et à faire toutes mes volontés, on peut deviner quel sang je me faisais ; pourtant je prenais patience, ne sachant pas trop comment sortir de là. Mais voilà-t-il pas qu’à présent Prascovia veut me marier avec un vieillard à faire peur ; conçois-tu cela, Catherine, un homme qui a trois fois mon âge, et moi qui trouve vieux un homme de vingt-cinq ans !
Catherine poussa un soupir plein de commisération.
À ce moment, André entra dans la salle par une porte donnant sur la cour. Les chevaux étaient à l’écurie et le traîneau rangé sous un hangar.
— Mais asseyez-vous donc ! s’écria Clélia. Je ne pense à rien, je vous laisse là debout.