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les cruautés de l’amour

l’amour d’un empereur, mais j’arrive assez tôt pour mourir avec toi ; ta main est tiède encore, ton âme attend son compagnon de voyage et voltige auprès de nous. Ne sois pas impatiente, ma douce Lon-Foo, me voici !

Un instant on vit briller un glaive, puis un ruisseau de sang coula sur le sol.

— Je ne demande qu’une grâce à l’empereur, qu’il me fasse ensevelir auprès de celle qui est morte pour moi ! dit Li-Tso-Pé en expirant.

L’empereur se tenait debout, les bras croisés, mordant ses lèvres, cachant sa colère et sa douleur à toute cette foule. Il regardait avec une haine jalouse le cadavre de ce beau jeune homme qui lui avait été préféré par la seule femme qu’il eût aimée.

— Faut-il accéder au désir du mort et faire enterrer les deux amants côte à côte ? demanda un mandarin.

— Non, je le défends ! dit l’empereur d’une voix brève.

Puis il s’éloigna et rentra dans son palais.

Peu de temps après cette aventure, les Mongols envahirent le territoire de la Chine. Hoaï-Tsong, détrôné, se tua. Ce fut le dernier souverain de la dynastie des Mings.

On peut voir encore, dans le vieux cimetière de