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les cruautés de l’amour

homme qui se laissa glisser ou plutôt tomber sur le sol.

Puis il s’enfuit sans regarder derrière lui. Il atteignit le mur du jardin et le mesura des yeux. Ce mur était haut et parfaitement lisse. L’escalader était impossible. D’ailleurs André en avait déjà trop fait, sa blessure à peine cicatrisée le faisait vivement souffrir. Il chercha une porte et finit par arriver à une sortie dérobée qui servait spécialement aux jardiniers. Plusieurs verrous et deux tours de clef fermaient la porte, mais la clef était dans la serrure. Il tira les verrous et fit tourner la clef. Sa main tremblait, un frisson courait sous ses cheveux, il lui semblait que tout oscillait autour de lui.

— Adieu ! adieu ! murmura-t-il ; adieu la vie !…

La porte grinça en tournant sur ses gonds ; mais, au moment où André allait la franchir, il se sentit enlacé par des bras de femme et un grand cri retentit à son oreille.

— Clélia !

— Qu’est-ce que tu fais ? où allais-tu ? dit-elle suffoquée par l’épouvante. Je savais bien que j’avais entendu un soupir et un bruit furtif. Mon Dieu ! si j’avais dormi, tu t’enfuyais, tu me laissais là, folle de désespoir ; car ton intention était de t’échapper, n’est-ce pas ? Mais tu veux donc me