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EN FAMILLE.

en amour monstrueux, si mes pressentiments ne me trompaient point, puisque vous étiez, aux cas qu’ils fussent vrais, la propre sœur de Vallombreuse. J’appris que les ravisseurs devaient vous transporter en ce château, et je m’y rendis en toute diligence. Vous étiez déjà délivrée sans que votre honneur eût souffert, et la bague d’améthyste a confirmé ce que me disait à votre vue la voix du sang.

— Croyez, monseigneur et père, répondit Isabelle, que je ne vous ai jamais accusé. Habituée d’enfance à cette vie ambulante de comédienne, j’avais facilement accepté mon sort, n’en connaissant et n’en rêvant pas d’autre. Le peu que je savais du monde me faisait comprendre que j’aurais mauvaise grâce à vouloir entrer dans une famille illustre, que des raisons puissantes forçaient sans doute à me laisser dans l’obscurité et l’oubli. Le souvenir confus de ma naissance m’inspirait parfois de l’orgueil, et je me disais, en voyant l’air dédaigneux que prennent les grandes dames à l’endroit des comédiennes : « Moi aussi je suis de noble race ! » Mais ces légères fumées se dissipaient bientôt, et je ne gardais que l’invincible respect de moi-même. Pour rien au monde je n’aurais souillé le pur sang qui coulait dans mes veines. Les licences des coulisses, et les poursuites dont sont l’objet les actrices, même lorsqu’elles manquent de beauté, ne m’inspiraient que du dégoût. J’ai vécu au théâtre presque comme en un couvent, car on peut être sage partout, quand on le veut. Le Pédant était pour moi comme un père, et certes Hérode eût brisé