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DOUBLE ATTAQUE.

promptitude de l’éclair, flamberge au vent et tomba en garde. De son côté, Lampourde n’avait pas été moins prompt à dégaîner. Il fut content de cette garde et se dit : « Nous allons nous amuser un peu. » Les lames s’engagèrent. Après quelques tâtonnements de part et d’autre, Lampourde essaya une botte qui fut aussitôt déjouée. « Bonne parade, continua-t-il ; ce jeune homme a des principes. »

Sigognac lia avec son épée le fer du bretteur et lui poussa une flanconnade que celui-ci para avec une retraite de corps, tout en admirant le coup de son adversaire pour sa perfection et sa régularité académique.

« À vous celle-ci, » s’écria-t-il, et son épée décrivit un cercle étincelant, mais elle rencontra celle de Sigognac déjà revenu à son poste.

Épiant un jour pour y pénétrer, les lames liées par les pointes tournaient l’une autour de l’autre, tantôt lentes, tantôt rapides, avec des malices et des prudences qui prouvaient la force des deux combattants.

« Savez-vous, monsieur, dit Lampourde, ne pouvant contenir plus longtemps son admiration pour ce jeu si sûr, si serré et si correct, savez-vous que vous avez une méthode superbe !

— À votre service, » répondit Sigognac, en allongeant une botte à fond au bretteur qui la détourna avec le pommeau de son épée par un coup de poignet aussi roide que la détente d’un cranequin.

« Magnifique estocade, fit le bretteur de plus en plus enthousiasmé, coup merveilleux ! Logiquement j’aurais dû être tué. Je suis dans mon tort ; ma parade