gros garçon, se frottant les yeux de ses mains crasseuses, alla ouvrir les portes de la cour, y fit entrer la voiture, ôta le harnais du cheval et le mit à l’écurie.
« Nous ne pouvons cependant pas laisser ce pauvre Matamore dans la voiture comme un daim qu’on rapporte de la chasse, dit Blazius ; les chiens de basse-cour n’auraient qu’à le gâter. Il a reçu le baptême, après tout, et il faut lui faire sa veille mortuaire comme à un bon chrétien qu’il était. »
On prit le corps du comédien défunt, qui fut étendu sur la table et respectueusement recouvert d’un manteau. Sous l’étoffe se sculptait à grands plis la rigidité cadavérique et se découpait le profil aigu de la face, peut-être plus effrayante ainsi que dévoilée. Aussi, lorsque l’hôtelière rentra, faillit-elle tomber à la renverse de frayeur à l’aspect de ce mort qu’elle prit pour un homme assassiné dont les comédiens étaient les meurtriers. Déjà, tendant ses vieilles mains tremblotantes, elle suppliait le Tyran, qu’elle jugeait le chef de la troupe, de ne point la faire mourir, lui promettant un secret absolu, même fût-elle mise à la question. Isabelle la rassura, et lui apprit en peu de mots ce qui était arrivé. Alors la vieille alla chercher deux autres chandelles et les disposa symétriquement autour du mort, s’offrant de veiller avec dame Léonarde, car souvent dans le village elle avait enseveli des cadavres, et savait ce qu’il y avait à faire en ces tristes offices.
Ces arrangements pris, les comédiens se retirèrent dans une autre pièce, où, médiocrement mis en appétit par ces lugubres scènes, et touchés de la perte de ce