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BRIGANDS POUR LES OISEAUX.

— J’ai fait si souvent le guet pour toi, j’ai tant couru afin de t’avertir quand le brouillard s’élevait de terre, et que la rosée mouillait mes pauvres pieds nus. T’ai-je jamais fait attendre ta nourriture dans tes cachettes, même lorsque la fièvre me faisait claquer du bec comme une cigogne au bord d’un marécage et que je pouvais à peine me traîner à travers les halliers et les broussailles ?

— Oui, répondit le brigand, tu es brave et fidèle ; mais nous ne le tenons pas encore, ce collier. Combien as-tu compté d’hommes ?

— Oh ! beaucoup. Un gros et fort avec une large barbe au milieu du visage, un vieux, deux maigres, un qui a l’air d’un renard et un autre qui semble un gentilhomme, bien qu’il ait des habits mal en point.

— Six hommes, fit Agostin devenu rêveur en supputant sur ses doigts. Hélas ! ce nombre ne m’eût pas effrayé autrefois ; mais je reste seul de ma bande. Ont-ils des armes, Chiquita ?

— Le gentilhomme a son épée et le grand maigre sa rapière.

— Pas de pistolets ni d’arquebuse ?

— Je n’en ai pas vu, reprit Chiquita, à moins qu’ils ne les aient laissés dans le chariot ; mais Chirriguirri ou la Mionnette m’aurait fait signe.

— Allons, risquons le coup, et dressons l’embuscade, dit Agostin en prenant sa résolution. Cinq coffres, des broderies d’or, un collier de perles. J’ai travaillé pour moins. »

Le brigand et la petite fille entrèrent dans le bois