Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/291

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

troupe sortait de la fortorosse en élevant des branches d’olivier. Bientôt, en effet, des hérauts écartant la foule crièrent :

— Rangez-vous devant celui qui tient en son pouvoir la vie et la mort des rois.

Et les chevaliers, faisant la haie sur le passage du Vieux de la Montagne, oubliaient tout dans la curiosité de le voir.

— Il daigne enfin se montrer lui-même ! se disait Amaury, en le regardant s’avancer. Il vient sans armes, avec une escorte restreinte, dédaigneux du danger.

Et, comme tous les autres, il était impressionné par l’air souverainement majestueux du magicien, par sa jeunesse, mais surtout par la douloureuse pâleur de son visage.

— On dirait qu’une clarté nocturne l’enveloppe, pensait-il, et il est, certes, étrangement beau.

— Roi Amaury, dit Raschid, d’une voix très douce, pourquoi songes-tu à attaquer ce château, que tu reconnais en toi-même être imprenable ? Pourquoi veux-tu me déclarer la guerre, quand la cause qui aurait pu la faire naître entre nous n’existe plus ?