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LE COLLIER DES JOURS

chons, au sommet du Pilate, le portail géant du divin Walhalla.

Mais le promontoire se rapproche ; nous distinguons les minces peupliers qui se dressent à sa pointe extrême, puis les arbres et les buissons touffus qui s’échelonnent, et voici que dans l’entrebâillement des branches apparaît l’angle du toit et toute une fenêtre de la maison.

Nous arrivons. La barque s’enfonce sous un petit hangar soutenu par des pilotis.

Avec quelle émotion nous prenons pied sur ce sol sacré !

Pas de porte, pas de clôture, aucune limite à ce jardin : le lac, les collines, les forêts, les Alpes, le monde, semblent en faire partie ; et comme cela plaît à notre jeune enthousiasme, comme cela est juste et prophétique, puisque le monde deviendra en effet le domaine de celui qui habite là !

Une pente douée monte vers la maison, qui nous apparaît au delà d’une vaste pelouse. Elle est toute simple, toute grise, longue et peu haute, sous son toit de tuiles aux rougeurs éteintes ; au milieu, un double perron de sept ou huit marches, qu’accompagne une rampe de fer, conduit au salon.