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le second rang du collier

bler beaucoup à Raphaël Sanzio, avec sa barbe légère, qu’il semble n’avoir jamais coupée, ses cheveux souples et ses beaux yeux noirs, si doux sous la longue frange des cils.

Dès que cela est possible, je le prends à part : j’ai un secret à lui confier, qui, j’en suis sûre, lui fera plaisir. Une élève de l’institution de Mme Liétard, où nous allons parfois comme externes, est amoureuse de l’illustre artiste et lui demande en grâce d’écrire quelques mots sur la photographie qui le représente et qu’elle a achetée.

— Tu comprends, elle t’a vu aux Italiens, dans le rôle d’Almaviva, et elle t’a trouvé si joli qu’elle ne pense plus qu’à toi et garde ton portrait dans sa poche, pour le regarder toute la journée.

Mario s’intéresse à mon histoire, un sourire lui chatouille les lèvres.

— Est-elle belle, ton amie ?

— Oh ! oui, et grande, grande : au moins vingt ans !… Et élégante !… elle porte des jupes larges comme ça !… Une vraie dame ! Je ne sais pourquoi elle est encore en pension.

— Tu l’as, cette photographie ?

— Bien sûr ! Elle m’a fait jurer, plus de dix fois, que je te l’apporterais.

Après un regard furtif vers Giulia, qui ne s’occupe pas de lui, Mario me dit en baissant un peu la voix :

— Monte voir les petites, et, après, va dans