Page:Gautier - Le Second Rang du Collier.djvu/50

Cette page a été validée par deux contributeurs.
42
le second rang du collier

quer, je descendais l’escalier. Dans le salon, je cherchais à tâtons le télescope, dont je connaissais bien la place, et j’empoignais la boîte très lourde que je pouvais à peine porter. C’était toujours la porte-fenêtre de la salle à manger qui, en grinçant, me trahissait : les volets, qu’il fallait pousser avec force, avaient, en s’ouvrant, une sorte de miaulement très particulier, que je ne pouvais éviter.

Aussi à peine avais-je monté le télescope sur son pied de cuivre, au bord de la terrasse, le seul endroit d’où l’on vit bien le ciel, que ma mère apparaissait, en chemise de nuit, une bougie à la main, dans le cadre de la porte.

— Qu’est-ce que tu fais là ?…

— Je note la position des satellites de Jupiter.

— C’est une jolie heure pour réveiller les gens et courir la pretentaine !

— Est-ce ma faute si les étoiles ne brillent pas en plein midi ?

— Tout cela est bel et bon, mais tu vas aller les voir dans ton lit.

Et il fallait remettre le télescope dans sa boîte noire, sans avoir vu Jupiter…



Dès le matin, quand nous dormons encore, retentissent dans la maison des déclamations bizarres et d’extraordinaires chansons.