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le second rang du collier

suppliait Théophile Gautier de venir chez elle, tout de suite. Il partit assez effrayé, mais il trouva la belle Russe debout devant sa psyché, essayant le costume de Salammbô qu’elle devait porter à un bal travesti chez la comtesse Walewska. Il s’agissait de savoir si le costume seyait, si rien ne manquait, si les détails étaient exacts : avec l’approbation de son grand ami elle serait tranquille.

Les deux fils de la princesse, deux gamins de dix ou douze ans, soulevaient le plus haut qu’ils pouvaient, chacun un candélabre, pour bien éclairer leur superbe maman, dont ils paraissaient très fiers.

Le costume eut beaucoup de succès, le soir de la fête ; il causa même un peu de scandale : les journaux de l’opposition clabaudèrent sur la chaînette d’or que les vierges carthaginoises portaient entre les chevilles et que la princesse n’avait pas voulu supprimer. Mais les clameurs lui importaient peu et n’altérèrent pas sa sérénité.

L’amour des lettres et la fréquentation des poètes avaient fait naître dans son esprit une haute ambition, qu’elle avoua bientôt : elle voulait écrire un livre !…

Chez une personne d’un caractère aussi résolu, du désir à l’accomplissement, l’espace fut court. Le livre avança vite, mais pour le mener à bien, les conseils et l’assistance de Théophile Gautier furent, plus que jamais, indispensables : il refit, anonyme-