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LA TUNIQUE MERVEILLEUSE

Le jeune homme reprit le chemin par lequel il était venu et disparut.

Restée seule, Perle-Fine s’approcha de la fenêtre pour regarder s’éloigner son futur époux.

— Comme il est agile ! pensa-t-elle ; s’il tombait, pourtant !… le voilà dans la cour, il marche à reculons et efface la trace de ses pas. Voici qu’il escalade un arbre… il atteint la crête du mur… Ah ! il a sauté dans la rue. Je le vois qui s’éloigne rapidement.

Mais elle referma vivement la fenêtre en entendant venir son oncle.

Quand il parut, elle s’agenouilla à demi devant lui.

— Votre enfant soumise vous souhaite bonheur et santé, dit-elle.

— Bonheur et santé ! Voilà des choses dont j’ai grand besoin, riposta Rouille-des-Bois, en maugréant ; mais je crois plutôt que je vais tomber malade. Un pauvre vieillard comme moi ne peut supporter tant de revers.

Et il se laissa tomber sur une chaise.

— Vous est-il arrivé quelque chose de fâcheux, mon oncle ? dit la jeune fille affectueusement.

— Comme si je n’avais pas assez des ennuis que me cause le dîner de ce soir ! Fallait-il encore me mettre en colère dans la même journée ?

— Qui donc, mon cher oncle, vous a mis en colère ?