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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

de leurs amis. Échauffés par le vin de riz, ils ne sentaient pas le froid, contre lequel les protégeaient d’ailleurs les plus belles et les plus chaudes fourrures. Les uns avaient leur manteau de soie doublé de renard noir, d’astrakan blanc, de rat de Chine ; les autres, de peau de lynx, de cerf ou de pélican ; un seul portait, comme s’il eût été prince, du dragon de mer, cette merveilleuse fourrure qui n’a pas sa pareille. Tous avaient des bottes de satin noir fourrées et des capuchons de velours, plus ou moins brodés, par-dessus leur calotte.

Ces jeunes gens étaient arrivés au faubourg Tsié-Tan, tout en continuant à rire et à causer.

— Chut ! mes amis, nous approchons, dit, un doigt sur ses lèvres, celui qui marchait en avant.
Ce jeune homme était le moins somptueusement vêtu de la joyeuse bande, mais c’était le plus charmant de visage et de tournure.

— Bambou-Noir, a raison, dit un autre ; adoptons l’allure silencieuse des poissons qui glissent dans le fleuve blanc.

Tous se turent et se mirent à marcher, avec des précautions exagérées, le long de la muraille. — Voici la maison de Rouille-des-Bois, reprit Bambou-Noir, cent pas plus loin.

Bambou-Noir appela d’un geste un domestique qui suivait à quelque distance les jeunes seigneurs. Le domestique s’avança ; il portait un rouleau de papier de diverses couleurs et un pot à colle.