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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

damnés, dont les dents claquaient avec un bruit sinistre, dépassaient à des intervalles égaux la surface dure de l’étang.

Miou-Chen pleurait et ses larmes se figeaient sur ses cils.

— Ces hommes sont les avares et les riches implacables, qui laissèrent mourir de froid, à la porte de leur palais, les mendiants qui suppliaient, dit le Roi de Jade.

Ils atteignirent le troisième enfer où étaient torturées des femmes attachées à des poteaux. Plusieurs démons au corps sanglant leur arrachaient les entrailles et les remplaçaient par des charbons ardents, ensuite ils recousaient la peau.

— Celles-ci sont les épouses adultères. Que leurs entrailles coupables subissent le remords brûlant.

Et le roi s’enfonça vers la quatrième région. Là se trouve une vaste mer de sang, dans laquelle se débattent une foule d’hommes et de femmes, tandis que sur ses flots épais navigue la nacelle du diable de cet enfer. Ce diable était entièrement vêtu de blanc et portait sur la tête un immense chapeau conique. Lorsque les damnés s’approchaient pour escalader la barque, il écarquillait les yeux, tirait la langue, et en se tordant de rire les repoussait d’un coup de pied.

— Tu assistes au supplice des débauchés et des femmes de mauvaises mœurs, dit le roi : ce diable blanc, c’est Ti-Fan, qui préside aux orages.