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UNE DESCENTE AUX ENFERS

Miou-Chen dit à l’envoyé du roi des enfers :

— Quel est cet homme malheureux ?

— Cet homme est le sage Ma-Min. Le grand Roi de Jade lui a envoyé ses diables pour le tenter.

Alors Miou-Chen s’approcha du sage :

— Ô ! Ma-Min, dit-elle, je vois ta pensée immaculée monter de ton front comme une vapeur et former la nuée glorieuse qui t’élèvera au royaume des immortels.

Puis la jeune fille continua sa route vers les enfers. Elle arriva dans la province de Sée-Tchoen et atteignit le pont d’or qui aboutit à la porte de l’enfer. Comme elle allait le franchir, elle fut contrainte de reculer par une foule tumultueuse d’hommes et de bêtes qui accourait de l’autre extrémité du pont Et comme elle s’étonnait :

— Tu vois ici ceux qui reviennent à la vie sous une forme nouvelle, lui dit son jeune guide : ces rois superbes étaient autrefois pauvres et vertueux » ces mendiants difformes furent pleins d’orgueil ; ces reptiles qui se traînent en sifflant ont été des hommes envieux et sournois ; ces oiseaux étaient de jeunes fous au cœur léger et insouciant ; quant à cette bande d’ânes qui ruent et braillent, ce sont pour la plupart d’anciens fonctionnaires sans probité.

Lorsque le troupeau bruyant se fut éloigné, Miou-Chen passa le pont et se trouva devant la porte voûtée et jaune, comme une porte impériale de Fou-Tou-Tchan la cité sévère. De chaque côté de