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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

laient sur son dos, se perdant dans les plis des robes.

Les filles d’honneur formaient un demi-cercle autour de leur maîtresse, et en face d’elle, de l’autre côté d’une légère balustrade sculptée, une danseuse, en robe longue, dont les manches flottaient, imitant des ailes, coiffée d’un étrange bonnet d’or, posé au sommet de la tête, dansait lentement en agitant un éventail. Un orchestre de musiciens l’accompagnait, jouant du gotto, du biva, de trois espèces de flûtes, du tambour et du tambourin.

À l’entrée du prince, la symphonie cessa, et, vivement, Fiaki se cacha la bouche derrière une des toiles d’araignée de sa manche, ce qui était à l’adresse de son père un salut tendre et pudique.

Lui, souriait de plaisir, en revoyant la beauté et la grâce de l’enfant qu’il idolâtrait. Elle s’était levée, marchant à sa rencontre et, comme une mer agitée par une subite tempête, la soie, le satin, le brocart, derrière elle, ondulaient en bruissant.

Il lui prodigua les surnoms les plus flatteurs, la nommant : Mouroui, l’Incomparable ; Réifé, la Beauté surnaturelle ; Réikio, le Parfum du Ciel ; puis il lui demanda si, elle était heureuse, si rien ne l’avait fâchée, si elle ne désirait rien.

— Ah ! prince illustre ! père adoré ! s’écria-t-elle en ployant son corps souple en arrière, dans un joli mouvement de douleur, comment être heureuse quand la terre souffre ? Comment sourire quand le ciel pleure ? Les dieux sont bien cruels d’avoir créé