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LE PARAVENT DE SOIE ET D´OR


« Une seule voix formidable clama :

— Oui, oui, nous le voulons : parle ! parle encore !

— Eh bien ! jetez loin de vous, et à jamais, les tronçons de la chaîne brisée ; redevenez libres, chassez l’envahisseur, le Chinois vorace, chassez-le du palais, de la ville, du royaume ; rendez au pays des Giao-Gi l’indépendance qu’on lui a ravie. N’hésitez pas, ne tardez pas : aujourd’hui, à l’instant même, devant ce sang impur qui souille notre sol, choisissez un chef, qui vengera nos ancêtres et vous conduira à la victoire !

— Toi ! toi seule ! clama la foule, sois le roi, sois le maître ; nous t’obéirons, nous te suivrons.

« Elle resta un instant silencieuse, les yeux levés vers le ciel, puis elle dit d’une voix ferme et haute :

— Les dieux m’ordonnent d’accepter. Ils me guideront et me soutiendront. Je serai votre volonté et vous serez ma force. Le roi de l’Annam vous le jure ici : il va vous délivrer et conquérir son royaume !…

« Et Fleur-Royale étend les mains comme pour prendre sous sa protection tout ce peuple prosterné.

« Oh ! les belles journées de batailles ! les saintes victoires ! les marches glorieuses ! Fleur-Royale, sous l’armure et le casque aux ailerons d’or, semblait le