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L’IMPÉRATRICE ZIN-GOU

trice guerrière est aux portes des palais. L’âme des héros l’anime vraiment. C’est elle qui, à travers les tempêtes et les obstacles, a conduit son armée à tant de victoires.

La première elle s’élance à l’assaut, franchit le fossé et heurte la porte royale en criant d’une voix éclatante :

— Le roi de Corée est le chien du Japon.

Les battants éclatent, s’écroulent et la conquérante passe sur les décombres.

Au dessus de l’entrée, elle fait suspendre sa pique d’ivoire et d’or, qui, durant des siècles, restera là.

C’est l’heure du carnage et du pillage ; les soldats vont se payer enfin de leur sang versé ; ils n’attendent plus que l’ordre de la souveraine.

Mais voici que, le front baissé, les mains liées derrière le dos, le roi de Corée s’avance dans la cour d’honneur, jonchée de morts et de blessés. Il s’est lui-même enchaîné comme un prisonnier, et il vient s’humilier, se soumettre, se rendre…

— Je suis ton esclave ! s’écrie-t-il avec un sanglot, en tombant aux pieds de la belle guerrière.

Alors sous la rude cuirasse, le cœur de la femme se réveille et s’émeut… Zin-Gou relève le pauvre roi, détache ses liens.

— Tu n’es pas mon esclave, dit-elle ; tu resteras roi de Corée, mais tu seras mon vassal.

Et elle défend de piller la ville. On s’emparera