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L’IMPÉRATRICE ZIN-GOU

Outsi, qui reste agenouillé, tout est suspendu seulement. J’ai emporté le corps du Mikado dans mes bras, je l’ai couché sous sa tente, disant qu’il était seulement blessé, qu’il guérirait : puis, le confiant à des gardiens, qui paieraient de leur vie la moindre indiscrétion, je suis parti en secret, et, semant ma route de chevaux morts, arrivé jusqu’à vos pieds.

Le beau guerrier lève les yeux vers la reine charmante, qui, la tête inclinée, le regarde aussi. Elle lit dans cette âme ardente, l’héroïsme, le génie, le dévouement, la tendresse peut-être ! Et elle, à la fois toute-puissante et si faible, comprend qu’appuyée sur un cœur pareil, elle peut devenir redoutable, invincible. Un sentiment étrange et tout nouveau frémit en elle, fait d’ambition et de courage. Comme si l’âme de son époux était venue renforcer la sienne, elle se sent prête à affronter tous les dangers, elle, la coquette, la nonchalante, qui tremblait au moindre présage !

— Merci, chef illustre, dit-elle à Také-Outsi, tu as fait ce qu’il fallait faire. Le Mikado vit toujours, il n’est que blessé. Demain nous irons le rejoindre au camp. C’est moi qui le remplacerai. Nous marcherons à la victoire. Toi, Také-Outsi, sois le soutien de l’Empire, je te donne le titre de Nai-Dai-Tsin.

Depuis plusieurs jours, l’illustre Impératrice Zin-Gou est en route. Také-Outsi l’accompagne, et une troupe nouvelle, qu’elle emmène pour renforcer l’armée, la suit.