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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

les avants-coureurs d’un cortège magnifique, qui devait traverser dans sa largeur, la rue des Marchands-de-Lanternes ; l’illustre mandarin Tchin-Tchan, gouverneur de Canton, allait faire sa visite de commencement d’année au vice-roi Koua-Pio-Kouen. Dès que la foule fut suffisamment écartée et comme coupée en deux tronçons, de nombreux domestiques, portant des petits cochons rôtis au bout de grandes piques de bois, s’avancèrent rapidement et traversèrent la rue, ensuite parut une chaise à porteurs, magnifiquement dorée et ouverte de toutes parts, où le gouverneur Tchin-Tchan était assis, vêtu de jaune, immobile, imposant ; derrière lui marchaient les porteurs de lanternes, de bannières, de parasols ; le cortège entra dans la rue des Pharmaciens, et la foule se referma.

Sang-Yong avait regardé l’illustre mandarin avec un enthousiasme étrange ; quelqu’un l’avait entendu se dire tout bas, à lui-même :

— Non ! le Fils-du-Ciel n’en a pas de plus belle ! Ouand le cortège eut disparu, le libraire continua de se diriger vers la dernière boutique de costumes ; il parvint à s’en approcher, après avoir tourné deux ou trois fois sur lui-même. Il commença d’en inspecter l’étalage, d’un air qui s’efforçait de paraître indifférent ; mais cette ruse ne trompa point le marchand.

— Quelle est la chose que tu cherches parmi mes merveilles, dit-il, et que tu parais ne pas trouver ? Il