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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR
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L’enceinte de la ville contenait des montagnes, des lacs, des rivières ; les rues, larges et droites, bordées de palais superbes, étaient traversées de portes triomphales aux toits sculptés et retroussés. Au loin, on apercevait la haute tour de Li-cou-li, la merveille des merveilles. Cette tour, construite il y a deux mille sept cents ans par les ordres du roi A-You, n’avait d’abord que trois étages : douze cents ans après sa fondation, l’empereur Kien-Ouan la répara et fit sceller dans les murs les reliques de Fo. Les Mongols la brûlèrent mille ans après, mais Yong-Lo la rebâtit, la dédia à l’impératrice-mère et l’appela la tour de la Reconnaissance : Li-cou-li. Elle s’élevait très haut, ayant neuf galeries superposées ; ses murs, revêtus de porcelaine jaune, rouge et blanche, brillaient comme les ailes d’un faisan ; les neuf toits, pavés de tuiles vertes, ressemblaient à des émeraudes, et le vent faisait une charmante musique en agitant les mille clochettes suspendues à chaque étage ; sur les terrasses s’élevaient les grandes statues des dieux et des génies, et au sommet de la tour une sphère d’or scintillait comme un soleil.

Des jardins ombreux environnaient, à cette époque, la tour de Li-cou-li, cachant de paisibles habitations aux toits très larges, construites en bois de cèdre. Des palissades de bambou, percées de portes treillagées ne fermant qu’au loquet, entouraient ces frais jardins ; près de chaque porte étaient assis, sur un