Page:Gautier - Le Paravent de soie et d’or, 1904.djvu/199

Cette page a été validée par deux contributeurs.
167
YU-PÊ-YA JETANT SA LYRE

— Votre élève désire se rendre à la maison Tson, dit Pé-Ya.

— Quoi, c’est à cette maison que vous voulez aller ? s’écria le vieillard ; et qui donc y cherchez-vous ?

— Je voudrais voir Tsé-Tchi, répondit Pé-Ya. En entendant cela, les yeux troubles du vieillard s’emplirent de larmes, et ces larmes coulèrent, et en sanglotant il répondit :

— Tsé-Tchi-Tson était mon fils !… L’année dernière, le quinzième jour du huitième mois, il revenait, assez tard, de son travail de bûcheron, lorsqu’il rencontra un ministre du royaume de Tsin, le seigneur Yu-Pé-Ya. Ils causèrent ensemble et se trouvèrent d’accord sur toutes choses, si bien qu’avant de le quitter, le seigneur donna à mon fils deux tablettes d’or. Tsé-Tchi acheta des livres pour étudier, et moi, pauvre vieux sans intelligence, je n’eus pas la pensée de l’arrêter : chaque matin il portait de lourdes charges, chaque soir il étudiait assidûment. Par tant d’efforts il usa son cœur ; il devint faible et malade… depuis quelques mois déjà, il est mort !…

Pé-Ya fut comme foudroyé par cette nouvelle ; des larmes jaillirent de ses yeux, il poussa des cris de désespoir et tomba évanoui au pied des monts.

Le vieillard, très effrayé, les yeux gonflés de larmes, le releva.

— Quel est donc ce seigneur ? demanda-t-il au jeune serviteur.