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YU-PÉ-YA JETANT SA LYRE

je quitte mes vêtements de pluie, j’entrerai ensuite.

Il ôta son chapeau et rajusta son turban d’étoffe bleue. Il retira son manteau qui recouvrait sa tunique de toile, attaché par une large ceinture qui lui servait de poche et laissait voir le pantalon. Très tranquillement il rangea son grand chapeau en forme de toit, son manteau, posa sa pique et sa hache à la porte de l’habitacle. Il ôta ses sandales en jonc pour secouer l’eau, puis il les remit et, pas à pas, entra dans la salle. C’était comme un pavillon de prince, très éclairé par des lampes et des bougies. Au milieu étaient disposés une table très somptueuse et un fauteuil pareil à un trône.

Le bûcheron salua seulement en soulevant ses poings et dit :

— Je vous salue respectueusement, Seigneur. Le grand mandarin du royaume de Tsin fut bien surpris de se trouver en présence d’un homme si simple en costume vulgaire ; ses yeux ne se souvenaient pas d’en avoir vu de pareil. Il ne savait quelle conduite tenir ; le saluer ? mais comment ?… Le renvoyer était impossible après l’avoir lui-même appelé. Il se décida à esquisser un salut, en soulevant un peu ses poings.

— Mon sage ami, dit-il, laissez les cérémonies. Et il dit aux serviteurs :

— Donnez-lui de quoi s’asseoir.

Les serviteurs apportèrent un humble escabeau et Pé-Ya dit avec une moue dédaigneuse :