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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

PÉ-MIN-TCHON

Tu te méprends sur mes sentiments. Il m’eût été bien doux de devenir vraiment ton frère… Eh bien ! écoute, je vais te dire mon secret. Tu jugeras si je dois me croire engagé : Cette nuit, tandis que je rêvais à celle que je dois aimer sans la connaître encore, quelqu’un jeta sur le seuil de ma porte un gage de tendresse : ce sachet. Puis, je vis une ombre gracieuse glisser entre les arbres. Je m’approchai et je parlai en tremblant à une femme inconnue qui m’écouta d’une oreille furtive, puis s’enfuit effarouchée. J’étais si ému moi-même que le souffle me manquait. Voilà tout. Par ce premier trouble de mon cœur, je me crois lié à cette femme. Dis-moi : qu’en penses-tu ?

SIAO-MAN, très émue.

Oh ! oui, oui ; ton cœur n’est plus à toi. Tu es lié pour jamais.

(Une chaise à porteur s’arrête au fond de la scène. Une vieille femme, très majestueuse, en descend. Elle a sur le nez une vaste paire de lunettes.)

Scène X

Les Mêmes, LA VIEILLE FEMME, au fond.
PÉ-MIN-TCHON, à SIAO-MAN

Cependant, si mon inconnue n’était pas telle que je la rêve ?