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LE RAMIER BLANC
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SIAO-MAN

Pourquoi dis-tu hélas ? Qu’est-ce donc que tu regretteras dans cette ville inconnue ?

PÉ-MIN-TCHON

Je ne le sais vraiment pas ; mais il est certain que ce pays a pour moi un charme singulier. C’est un vague pressentiment, peut-être, que ma destinée doit s’accomplir ici. En m’éloignant, j’aurai comme un remords, et quelque chose me dira : La part de bonheur qui t’est réservée, c’est dans cette ville qu’elle t’attendait, tu as passé trop vite et tu n’as su la voir.

SIAO-MAN

C’est peut-être un avertissement des dieux.

PÉ-MIN-TCHON, souriant.

Depuis quelques instants, je pense que ce pressentiment m’annonçait que je rencontrerais ici mon premier ami.

SIAO-MAN

Ah ! seigneur, ne te moque pas de moi.

PÉ-MIN-TCHON

C’est très sérieux, je t’assure. N’as-tu jamais vu, par exemple, un chien errant choisir tout à coup un maître parmi les passants, le suivre et lui faire fête ?