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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

SIAO-MAN

Il m’a demandé si je n’avais pas perdu quelque chose.

FAN-SOU

Ah ! Et tu lui as répondu que non ?

SIAO-MAN

Je lui ai fait signe que non.

FAN-SOU

Eh bien, tu t’es trompée : tu as perdu quelque chose.

SIAO-MAN

Non, je t’assure.

FAN-SOU, croisant les bras et prenant une mine sévère.

Oui ! tu as perdu plus qu’un trésor, plus que tous les trésors du monde : tu as perdu la pudeur qui est pour les jeunes filles comme le socle d’or du dieu Fo. Comment ! Toi, si soucieuse des rites, que tu refuses de toucher aux mets qui ne sont pas servis selon l’ancien usage, et qui ne consentirais pour rien au monde à t’asseoir sur une natte mal étendue, tu oublies le respect de toi même au point de courir les rues au milieu de la nuit et de prêter l’oreille à la voix d’un jeune homme ! J’en suis pétrifiée de stupeur ! Tu ne te souviens donc plus que celle qui offense les rites prescrits, qui se laisse voir ou en-