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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR

PÉ-MIN-TCHON (Il s’avance et salue en élevant les poings fermés à la hauteur de son front.)

Noble jeune fille ! c’est en tremblant que je t’adresse la parole. Mais je me trouve dans une situation difficile : Bien que je sois innocent, je pourrais être accusé Comme voleur (Siao-Man se recule avec effroi). J’ai trouvé un objet précieux et je cherche, pour le lui rendre, celui à qui il appartient. N’as-tu rien perdu sur cette place (Siao-Man fait signe que non.) En es-tu bien sûre ? Aucun collier n’a glissé de ton cou ? Nulle perle ne s’est détachée des épingles qui ornent tes cheveux ? (Siao-Man fait signe que non.)

PÉ-MIN-TCHON, plus bas.

Mais ton cœur n’a-t-il pas perdu quelque chose de sa tranquillité ? As-tu toujours la gaîté des jeunes tourterelles qui n’ont pas encore construit leur nid ? (Siao-Man se recule vivement.) Ne me fuis pas, jeune fille, je t’en conjure ; écoute encore un instant. Je puis me comparer à un ramier dont les ailes sont entravées par un réseau de soie. Est-ce toi, dis, qui as tendu le doux piège où s’est prise ma liberté ?

(Siao-Man, toute tremblante, secoue la tête.)

Je dois me taire alors ; j’ai trop parlé déjà ! J’ai peut-être dévoilé le secret de celle qui pense à moi. Je ne sais pourquoi, j’aurais voulu que tu fusses celle-là !

(On entend venir Fan-Sou. — Siao-Man effrayée fait signe à Pé-Min-Tchon de s’éloigner. Il rentre précipitamment dans la pagode ; pas assez vite pour que Fan-Sou ne l’ait pas aperçu.)