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LE PARAVENT DE SOIE ET D’OR
FAN-SOU, lui mettant la lanterne sous le nez.

A-Mi-To-Fo ! la voilà ! Je n’en puis croire mes yeux ! le feu est-il à la maison ? es-tu prise de folie ? es-tu malade ? (Elle fait le tour de Siao-Man.) Mais non, elle semble se porter à merveille. (Elle lui tâte le pouls.) La main est fraîche, le pouls régulier, la tête ne brûle pas. (Elle dépose la lanterne à terre et croise les bras.) Ah ! c’est donc ainsi qu’on se cache de moi ? C’est ainsi qu’on se glisse hors de sa chambre en faisant si peu crier le plancher, que l’oreille exercée de Fan-Sou croit n’avoir entendu que le vent qui souffle sur les fleurs ! Voilà comment une jeune fille, respectueuse des convenances, sort sournoisement de sa maison.

SIAO-MAN

Écoute-moi, Fan-Sou…

FAN-SOU

Oui, oui, si ta vénérable tante, qui depuis trois ans est partie pour recueillir l’héritage de son époux, revenait subitement et te disait : « Petite scélérate, que fais-tu à une pareille heure sur la place publique ? » Tu lui répondrais : « Écoute-moi, ma tante… »

SIAO-MAN

Mais, Fan-Sou, vois donc la fête que donne le printemps, vois la douce lumière que la lune répand sur l’or neuf des longues feuilles de saules, regarde