Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/88

Cette page a été validée par deux contributeurs.

seize liangs d’or à cet homme. Je te charge de garder ce poisson ; s’il tombe une seule écaille de son dos je te ferai couper la tête.

Le maître rentra dans son appartement. Le serviteur descendit avec rapidité, s’approcha du marchand, et en le regardant fit un geste de surprise :

— Ko-Li-Tsin ! cria-t-il.

— Yo-Men-Li ! dit Ko-Li-Tsin en écarquillant ses yeux.

— Comment en une nuit es-tu devenu pêcheur ?

— Et toi, comment es-tu devenue le serviteur préféré de l’eunuque Kouang-Tchou ? Mais, ajouta Ko-Li-Tsin d’un air inquiet, Ta-Kiang ?

— Il est en sûreté, dit Yo-Men-Li avec un sourire plein de fière joie.

— Gloire aux Pou-Sahs ! Moi, j’ai été poursuivi. On voulait me battre. J’ai volé comme une hirondelle. Je suis tombé dans une barque. Ce matin je mourais de faim, et je n’avais pas un tsin. J’ai trouvé des filets dans la barque. J’ai pêché. Par bonheur, j’ai pris un Poisson Jaune. On m’a indiqué la demeure de l’Intendant des Banquets de la Munificence Impériale. Le Pou-Sah des rencontres m’a bien servi, et je t’ai revue. Voilà mon histoire, raconte-moi la tienne.

— D’abord il faut que tu manges, dit Yo-Men-Li. Viens avec moi ; mais n’oublions pas le poisson.

Ko-Li-Tsin le prit dans ses bras et suivit la jeune fille. Ils entrèrent dans une vaste salle affectée aux repas des domestiques. Tandis que le poète déposait son fardeau sur une étagère, Yo-Men-Li trouva dans