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dépasser, puis, quand ceux-ci, s’étant retournés, étaient sur le point de le saisir, il se dérobait en un bond prodigieux.

Depuis quelques instants il tournait autour d’un pavillon qui semblait inhabité. Ayant réussi à dépister momentanément ceux qui le poursuivaient, il s’arrêta dans l’angle d’une porte pour reprendre haleine. Quelqu’un le tira doucement par la manche ; c’était la jeune servante de la fenêtre.

— Suis-moi, dit-elle à voix basse.

Et elle l’entraîna de l’autre côté de la porte, qu’elle ferma sans bruit. Ko-Li-Tsin se trouva dans un couloir étroit qu’éclairait assez obscurément une lanterne de soie posée sur la première marche d’un escalier.

— Apprends-moi d’abord qui tu es, dit la servante ; car si tu étais un voleur, ma maîtresse te laisserait battre par son père.

Ko-Li-Tsin répondit d’une voix entrecoupée par son souffle haletant :

— J’étais perdu dans les rues de Pei-King à une heure avancée. Pour éviter la ronde de police je suis entré dans ce jardin, dont la porte était ouverte. J’espérais que je pourrais sortir sur l’heure ; mais on ferma la porte, et je me suis trouvé prisonnier. Je m’appelle Ko-Li-Tsin, et je suis poète.

— Je te crois, dit la servante, car le bouton de Kiu-Jen orne ton chapeau. Voici ce que te dit ma jeune maîtresse : « Je m’appelle Tsi-Tsi-Ka, et j’aurai dix-sept ans quand luira la douzième lune. Il y a quelque temps, mon père, qui était alors gouverneur du Chen-Si, déclara dans un festin que j’épou-