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Pou-Sahs dorés accroupis dans des niches pavées de turquoise, se dressent, gigantesques, sur quatre piédestaux de bronze, les statues de cuivre des quatre gardiens de Fô ; celle-ci est armée d’un glaive, celle-là porte une guitare ; la troisième s’abrite sous un large parasol ; la quatrième serre la gorge d’un serpent ; au milieu d’elles, Fô, d’argent, resplendit, avec un soleil sur la poitrine, entre deux Génies de porphyre, couchés, l’un sur un lion, l’autre sur un éléphant, et, derrière lui, dominant toutes les statues, en or, s’élève Koan-In, la déesse miséricordieuse, qui chevauche un tigre de jade.

Or, cette nuit, de nombreux personnages, en divers groupes, emplissaient la pagode. D’un côté, sous les vives lumières des lanternes, brillaient des hommes au costume somptueux, qui étaient de grands dignitaires de l’empire ; les uns appartenaient à la Cour des Rites ; d’autres semblaient venir de la Forêt des Dix Mille Pinceaux ; plusieurs étaient des Chefs de Troupe ; un seul faisait partie du Palais impérial et était vêtu de jaune. À droite se mouvait tumultueusement un flot d’individus se rattachant aux castes inférieures des Cent Familles. Enfin, devant la statue de Fô, trente bonzes, la tête entièrement rasée, enveloppés de robes noires, longues, aux manches pendantes, se tenaient agenouillés, et, parmi eux, le Grand Bonze, très vieux, au crâne luisant, le front orné d’une tiare, le cou chargé d’un grand collier de perles qui tombait jusqu’au ventre, se dressait dans une longue robe couleur