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Le jeune homme de Chi-Tse-Po avait des pensées hautaines, mais ses actions étaient inférieures.

Il cultivait le chanvre et le riz ; il cultivait aussi l’aloès et le blé.

Mais les Génies immortels avaient semé dans son esprit une graine d’ambition ;

Et le jeune homme, laissant se courber les épis et les tiges de chanvre, se dirigea vers d’autres travaux afin de faucher les blés d’or de l’approbation.


L’improvisateur se tourna vers Ta-Kiang dans le but d’apaiser avec modestie les enthousiasmes qu’il prévoyait ; mais Ta-Kiang, silencieux et en proie à son rêve hautain, n’avait pas prêté l’oreille. Ko-Li-Tsin, déconcerté, regarda Yo-Men-Li. Celle-ci contemplait Ta-Kiang avec une tendre inquiétude : timide et retenant son souffle, elle suivait sur la face morne du maître le reflet des luttes intérieures. Quand il fronçait les sourcils, elle sentait son cœur battre d’effroi ; mais s’il laissait échapper un cruel sourire, elle redevenait joyeuse et pensait : « Maintenant il est victorieux. » Ko-Li-Tsin, plein de dépit, se mit à chantonner d’un air qui voulait paraître indiffèrent et se fit à part lui la promesse d’être peu prodigue, à l’avenir, des trésors de son esprit.

Les trois aventuriers suivaient la longue Avenue du Centre, cahotés par le pas inégal de leurs montures lasses.

— Oh ! oh ! dit un barbier ambulant en toisant