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Fou-Tze, ou vers l’une des hautes portes qui donnent entrée dans l’auguste Cité Jaune.

Au delà de ces portes, plus de foule, plus de tumulte ; quelques graves bonzes circulent avec lenteur, montrant leurs têtes entièrement rasées, laissant traîner leurs longues robes grises, rouge feu, jaunes d’or, à collet et parements noirs, et cachant leurs mains dans de grandes manches flottantes ; de hautains lamas, au front inspiré, aux yeux exaltés par un rêve, d’illustres fonctionnaires dans de somptueuses chaises à porteurs, se dirigent vers les pagodes où ils ont coutume de faire leurs dévotions ; plus rarement passe un lettré de haut grade qui se fait conduire, accompagné d’un nombreux cortège, au Palais des Érudits, qu’on nomme Han-lin-Yuan. Aucune boutique laborieuse ne souille les larges avenues, pavées de marbre, de la Cité Jaune ; immense, claire, calme, avec ses innombrables temples, qu’entourent des bois mystérieux, ses fiers palais cernés de blanches galeries, et ses parcs où luisent des étangs mornes, elle se déroule somptueusement. De toutes parts mille splendeurs éclatent. Au-dessus d’une forêt de cèdres noirs et de saules au feuillage clair, s’étagent la grande Pagode des Ancêtres Impériaux, où le Fils du Ciel vient rendre hommage aux Mânes glorieux, et l’Autel de la Terre et des Champs, kiosque énorme, qui espace d’innombrables colonnettes incrustées d’émail bleu et renfle une toiture légère, formée de lames d’argent brillant comme des ailes de cigogne. Imposante et précédée d’un vaste escalier de marbre gris,