Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/34

Cette page a été validée par deux contributeurs.

douaniers, apparaissent, face à face, à droite le Temple du Ciel, qui est rond, à gauche, le Temple de la Terre, qui est carré. Leurs magnifiques jardins, plantés de cèdres, de saules, de jujubiers, et bordés d’un mur rose à crête émaillée de jaune, laissent voir à travers les branches, des dômes couleur d’azur, des murs dont l’émail bleu est parsemé d’étoiles d’or et de hardis escaliers d’albâtre.

Après ces riches frondaisons, qui projettent leur ombre sur l’avenue, des maisons rares, humbles, basses, aux toits de tuiles ternes, aux étroites fenêtres treillagées de roseaux, aux portes en saillie, que protègent mal de minces auvents d’ardoises, se dispersent parmi des terrains cultivés et tournent de ci, de là, sans règle, leurs petites façades grises. Mais, à mesure qu’on pénètre plus avant dans la Cité, les maisons se rapprochent, s’exhaussent et s’alignent ; les façades se revêtent de laque, des galeries finement découpées circulent autour des corniches, et les toitures, à chaque angle, se décorent de dragons ou d’oiseaux fantastiques ; on était dans un chemin, on se trouve dans une rue. L’Avenue du Centre, naguère monotone et traversée à peine par quelques paysans, se colore et se peuple ; une triple porte triomphale apparaît. Des banderoles multicolores frissonnent, attachées à des poteaux de bois rouge. Cent boutiques projettent verticalement leurs enseignes jaunes, bleues, argentées. Bruyantes et populeuses, des rues s’ouvrent sur la voie principale et y déversent leurs passants. Mille gens sortent de leurs maisons. On piétine dans la poussière