Page:Gautier - Le Dragon Impérial, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/307

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tua naguère en souvenir d’une bataille où lui-même, délaissé par Koan-Ti et environné d’ennemis, fut sauvé par un guerrier célèbre, Tchin-Tsou, qui, se précipitant au milieu des combattants, couvert de blessures, le front saignant, mais rugissant et le visage terrible, arracha, n’ayant plus d’armes, les étriers de l’empereur, et, formidable, avec ce fer, mit en fuite l’ennemi. C’est pourquoi les soldats de Tchou-Tié-Teng portent un étrier de fer emmanché à un pieu. Non loin d’eux grimaçaient les effroyables Li-Kioh-Ping aux cuirasses de corne noire, aux crinières noires éparses, aux noirs visages vernis qui sont hérissés d’une folle barbe rouge et borgnes artificiellement. Les Archers Tartares, l’anneau d’agate au pouce, cambraient leur taille et lançaient des traits aux plumes colorées ; sur leurs épaules, sur leurs dos, sur leurs poitrines, des caractères d’or rappelaient la gloire du guerrier Li-Siou, le Preneur de Flèches, qui n’allait au combat qu’avec son arc, et renvoyait aux ennemis leurs propres projectiles, qu’il attrapait au vol. Enfin de loin en loin, encourageant et ordonnant, s’agitaient des chefs aux poitrines glorieuses, illustrées de lions brodés, de panthères, de chats sauvages et de licornes marines.

Mais, malgré la splendeur intrépide des soldats impériaux, les rebelles, sur tous les points, étaient vainqueurs. À gauche, dans la place enveloppée de flèches frémissantes comme d’une nuée d’oiseaux, la veuve de Gou-So-Gol, montée sur le cheval du guerrier sacrifié, attaquait furieusement une maison et en brisait la porte ; plusieurs chefs autour d’elle