Mille guerriers sont morts pour moi sans que tu aies accompagné d’un regret leur âme glorieuse.
— C’est le sort et la gloire des guerriers de mourir violemment, dit Ko-Li-Tsin en se jetant aux pieds de l’empereur ; mais les jeunes filles sont faites pour vivre aimées et pour mourir doucement. Ne laisse pas se briser le corps charmant de Yo-Men-Li sur les dalles ; ne la laisse pas tuer cruellement ; elle si douce, si dévouée, et qui t’adore !
— Allons, dit Ta-Kiang, annonce à l’envoyé de Kang-Shi que je donne le signal de l’attaque.
Ko-Li-Tsin se releva fièrement.
— Non ! s’écria-t-il, non ! quand ta colère devrait me foudroyer, ô cœur plus féroce que le cœur des tigres, je n’irais pas porter cette réponse impitoyable.
Ta-Kiang regarda le poète avec surprise.
— Il faut savoir pardonner des crimes aux bons serviteurs, dit-il.
Puis il fit signe au Grand Bonze de transmettre ses paroles.
Ko-Li-Tsin s’élança hors de la tente. Il rencontra Yu-Tchin ; elle l’attendait, comme toujours.
— Viens, dit-il, viens pleurer avec moi, et apaise mon cœur, que tord le désespoir.
Et, cachant son visage dans sa main, il entraîna Yu-Tchin loin des murailles.
Cependant le Grand Bonze répétait au mandarin les paroles de l’empereur. Yo-Men-Li, d’elle-même, sans hésiter, mit le pied sur un créneau. Mais au moment où elle allait se précipiter, un cavalier res-