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plairont ; puis laisse la ville flambante et reviens promptement.

Les Tsian-Kiuns, hurlant de joie, se relèvent et courent chacun vers un point du camp afin de rassembler leurs hommes. Le gong vibre, le tam-tam claque, tout le camp s’ébranle tumultueusement, chaque œil lance un regard féroce : on va piller et tuer. Le sang de la veille, qui noircit et s’écaille sur les bras des soldats, va être lavé dans du sang tiède et vermeil. Le signal du départ tinte, une clameur furieuse lui répond, et les guerriers, par troupes, s’élancent en faisant de grandes enjambées et en brandissant dans chaque main un glaive bien aiguisé.

Gou-So-Gol arrive le premier sous les murs, et l’élite de l’armée se rue derrière lui avec d’effroyables hurlements. La ville, remplie d’effroi, reste silencieuse. Mais les assaillants sont si nombreux que la proie est trop petite pour eux. Tandis que les premiers trépignent au bord du fossé, les derniers ondulent encore au loin dans la plaine, et une irrésistible poussée précipite plusieurs soldats dans l’eau.

Tout à coup une pluie de flèches descend du faîte des murailles vers Gou-So-Gol, mais toutes percent la terre autour de lui sans le toucher. Mille fusées meurtrières, dont les baguettes sont des lames aiguës, s’élèvent bruyamment et retombent sur les crânes des assiégés. Alors les frêles dragons de bronze vert rangés sur les bastions crachent des projectiles brûlants qui vont faire au loin des trous dans les rangs