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LE DRAGON IMPÉRIAL

En ce moment Ta-Kiang heurta un caillou de sa bêche avec un tel courroux qu’elle se brisa dans un pétillement d’étincelles.

— Tant mieux ! cria-t-il. Ah ! terre détestée, je me suis trop souvent courbé vers ta face triste et noire ; je respire depuis trop longtemps le parfum malsain des plaies que je fais ; c’est assez. Tu me reprendras un jour, terre vorace ; alors tu me rongeras et tu me détruiras ; mais jusqu’à ce jour du moins tu ne me verras plus, car je veux tourner désormais mon visage vers le ciel salutaire, vers le grand ciel salutaire et lumineux !

Ta-Kiang se dressa fièrement et, croisant ses bras sur sa poitrine, il se mit à marcher avec agitation.

— Prends garde ! s’écria Ko-Li-Tsin en riant de tout son cœur ; prends garde au mauvais génie qui te conseille la révolte ! car, un, deux, trois, quatre, ajouta-t-il en comptant sur ses doigts :


Les méchants Yé-Kiuns nous montrent souvent du doigt un diamant qui scintille sous le soleil au fond d’un précipice ;

Nous descendons pleins de joie et dédaignant les piqûres des ronces, mais le soleil se cache, et à la place du diamant il n’y a plus qu’un caillou humide.

Honteux et tristes nous remontons péniblement ; les mauvais Génies, pendant notre absence, ont mis le feu à notre maison et dérobé notre sac d’argent.