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n’aimant qu’à courir et qu’à jouer dans les champs.

Le poète travailla tout le jour. Il ne s’interrompit que lorsque la douzième heure fut sur le point de sonner ; alors il rentra dans sa cellule afin que le geôlier ne vînt pas le surprendre sur la terrasse. Le soir, la tige de bambou avait le contour vague des épaules d’un animal, et la cigogne était partie, emportant une seconde lettre pour Yu-Tchin. Il se coucha, mais, auparavant, il avait attaché la carcasse de bambou à la balustrade de porcelaine, car depuis quelques jours les terribles typhons de Tartarie soufflaient avec une violence redoublée, et ils auraient pu emporter le précieux bâton contourné.

Le lendemain l’oiseau apporta une seconde tige plus courte que la première. Ko-Li-Tsin l’attacha par un bout de sa fantastique bête ; puis, liant un cordon à l’une des épaules, il le fit passer sous l’extrémité inférieure de la tige centrale, le ramena vers l’autre épaule, l’y fixa, et, ces choses faites : Il ne me manque plus que du papier, dit-il.

La cigogne employa trois jours à transporter les papiers de diverses couleurs dont Ko-Li-Tsin avait besoin ; il les découpa soigneusement et étiqueta les morceaux. Le quatrième jour, Yu-Tchin envoya un morceau de colle ; mais, n’ayant pas de feu, il ne savait comment le faire fondre. Il attendit la douzième heure, et dit au geôlier, qui venait lui apporter sa nourriture quotidienne :

— Voilà bientôt un mois que je suis ici ; je m’ennuie.