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le collier des jours

qui d’un seul élan, avec leur figure ridicule, leurs plumes toutes gonflées, s’élancèrent sur moi en glapissant. Les uns m’insultaient, tandis que les autres m’envoyaient des coups de bec et me déchiraient ma robe. J’eus une peur terrible, qui se manifesta par des cris, et une prompte retraite.

Une fois hors de danger, je me montrai très vexée de l’aventure. Mes compagnons m’assurèrent que je n’aurais pas dû me présenter ainsi, devant des dindons, avec une robe bleue, car ces animaux détestent le bleu, comme les vaches, le rouge.

Je n’ai jamais contrôlé cette affirmation, qui ne me laissa pas le moindre doute, et, aujourd’hui encore, je ne serais pas très tranquille, si je me rencontrais, vêtue de bleu, avec des dindons.

Au retour de ces expéditions, je rentrais à la maison, en coup de vent, comme une trombe, comme un orage. Les papiers volaient en l’air, les portes battaient, les chats disparaissaient sous le lit, tandis que, les cheveux emmêlés, les yeux fous, je me laissais tomber sur un siège, avec un soupir.

C’est à cette époque que l’on me donna le surnom bien mérité, d’Ouragan, que j’ai gardé longtemps.

Plus tard, un autre s’y ajouta, assez vilain et