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le collier des jours

dais le bâton à cire faire son ronron et le coup de brosse qui réparait le désastre.

La pièce la plus soignée était la chambre des tantes, où je couchais aussi. On avait réuni là les meilleurs restes de l’ancienne aisance : de gros meubles de style Empire, tous de l’acajou le plus foncé, des rideaux de lampas, d’un rouge presque noir, des coussins à bandes de tapisserie, la précieuse garniture de cheminée, lapis et or, et toutes les épaves où s’attachaient des souvenirs.

Au mur principal, était suspendu le portrait, grandeur naturelle, de la mère défunte, si différente, physiquement, de tous ceux de sa descendance : blonde, au nez aquilin, aux yeux bleus, à la peau rosée. Il y avait aussi, dans des cadres ovales, quatre têtes de femmes que mon père, en 1829, n’ayant pas alors 18 ans, avait peintes à l’occasion de la fête de sa mère.

Dès que l’on était levé et une fois la chambre faite, on fermait les persiennes, pour maintenir une pénombre favorable à la conservation de toutes ces splendeurs.

Les deux fenêtres donnaient sur la route de Châtillon, ainsi que celle de la cuisine, séparée de la chambre par le palier de l’escalier.

La chambre de grand-père était de l’autre côté, sur le jardin, après la salle à manger.