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XIV




Un matin, on trouva morte la chèvre blanche.

Quelle émotion ! Quelle catastrophe !

Savais-je ce qu’était la mort ? Jamais jusque-là je n’avais eu d’elle aucune notion ; mais elle est en nous et je crois qu’on la comprend d’emblée. J’avais bien le sentiment que c’était quelque chose de définitif ; que, plus jamais, la chèvre blanche ne traînerait ma voiture ; qu’elle ne m’appellerait plus, en bêlant, de sa logette, sous l’escalier ; que je n’entendrais plus les chocs rapides de ses petits sabots sur les marches, quand elle s’échappait pour me rejoindre. J’étais consternée, mais sans cris et sans larmes.

Le lendemain, on vint chercher la morte, pour l’emporter, et j’eus, alors, une impression effrayante.

Dans l’impasse, qu’elle emplissait presque entièrement, m’apparut une voiture terrible,