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le collier des jours

Les tantes se trouvaient, là, moins isolées, moins perdues, que sur la route de Châtillon ; elles avaient des amies parmi les voisines, dans la maison même, et j’y trouvai tout de suite d’agréables compagnons de jeu.

Le mobilier s’était enrichi d’un vieux clavecin, venu je ne sais d’où, et qui m’émerveilla par ses sons fêlés, lointains et mystérieux. Il me faisait penser à Mlle du Médic, et, peut-être, venait-il d’elle.

Je revis l’aristocratique demoiselle, plus mince et plus pâle, plus droite que jamais, et qui semblait se retrouver dans son vrai cadre, sous ces hauts plafonds, devant ces boiseries claires et enrubannées de sculptures. Ses longues mains, voilées de mitaines, faisaient toujours du filet, et la levrette Flox, fragile et gracieuse, continuait à ne pas vouloir poser ses pattes sur le parquet.

Je me serais vite reprise à cette vie libre et aux courses au grand air ; mais mon père vint me chercher, après une semaine ; il ne voulait plus me laisser longtemps éloignée de la maison ; peut-être aussi s’était-il déjà accoutumé à moi, et il trouvait que je lui manquais.