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le collier des jours

— Hé ! hé ! disait, le grand-père, les nonnes sont venues à bout de la diablesse ; il n’est plus question de Chabraque, et l’Ouragan se calme.

— Elles l’ont rendue sournoise, disait tante Zoé.

Et tante Lili approuvait de la tête.

Mais cela ne durait pas. J’allais revoir tous les coins familiers, toutes les figures connues ; je m’essayais à regrimper dans le catalpa, dans les abricotiers des vergers, je risquais quelques galopades à travers la prairie, et, bientôt comme un drapeau longtemps roulé qui se défripe, je recommençais à flotter gaîment, à faire fête à l’air libre.

Je revis le bon curé de Montrouge, qui avait une communication à me faire. Après de patientes recherches, il avait fini par découvrir une « Sainte Judith ». Cela le taquinait de me voir porter un nom, qui n’avait pas de date dans le calendrier ; depuis longtemps, il fouillait le Martyrologe et il était très fier d’avoir retrouvé cette sainte Judith, vierge et martyre, dont la fête tombe le 5 mai. Il avait même fait la trouvaille d’une petite image, bordée de dentelle, qui la représentait. Il la conservait entre les feuillets de son bréviaire et me la donna. Bien des années je l’ai gardée, à cause de lui, dévotement.