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le collier des jours

Au retour de ces escapades, je payais tout de suite en petits bouts de papier bleu et Catherine, honteuse, s’exécutait aussi, tout attristée et repentante.

Il y avait, pourtant, des punitions pour lesquelles je dédaignais de me racheter, celle surtout qui consistait à avoir le tablier noir relevé sur la figure. En général, toute la classe la subissait en même temps et je trouvais cela plutôt amusant et très ridicule. J’avais d’ailleurs un moyen, qui réussissait presque à coup sûr, de faire pardonner à toutes.

Une verve très singulière m’était venue depuis quelque temps, un besoin de discourir abondamment, sur les sujets les plus imprévus. La teneur et le style de ces beaux discours m’échappent tout à fait, mais j’ai le souvenir très net des effets qu’ils produisaient.

Le tablier sur la tête, dans le silence consterné de la classe, je commençais à parler, à demi-voix, comme à moi-même, puis je haussais le ton insensiblement. Je m’adressais à mes compagnes, les exhortant, sans doute, au repentir, avec des inflexions et des éclats de voix de prédicateur en chaire.

À travers l’étoffe, j’y voyais un peu. Je guettais le visage de la mère, je voyais le coin de sa bouche remuer, pour un sourire qu’elle retenait, mais, de plus en plus irrésistible. Tout à