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teinte de beurre, et l’humidité bossuait, par places, le plancher grisâtre. Un vieux piano carré, sur lequel « les grandes » venaient étudier, s’appuyait à la paroi opposée aux fenêtres, et c’était tout.

Quand je descendis pour la première fois le petit escalier, poussée par la mère Saint-Raphaël, une vingtaine de petites filles menaient dans la classe un grand tapage, qui s’éteignit subitement.

À un des bouts du double rang de pupitres, devant une petite table, la religieuse avait sa chaise. Elle me fit venir près d’elle, et je dus subir un examen. Il se trouva que les leçons de mon grand-père m’avaient menée assez loin, et que j’allais être une des plus avancées de la petite classe. J’étais une des plus jeunes, mais ma taille, au-dessus de mon âge, me mettait parmi les grandes.

On me donna un ruban vert, en laine, large de deux doigts, qui était la couleur distinctive de la division. La façon de l’enrouler était assez compliquée : il devait entourer la taille, passer sur les épaules en se croisant dans le dos et sur la poitrine. Cela égayait un peu le noir du costume.

Mes cahiers et mes livres étaient déjà rangés dans un pupitre devant lequel on me fit asseoir, et une demi-heure fut accordée pour