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voyant pas revenir, que celui qui venait pour t’acheter s’est donné à toi.

La même proposition avait été faite au général Signénari.

— Hiéyas m’offre de me donner tout ce je voudrais, s’était écrié le jeune général, eh bien ! qu’il m’envoie sa tête !

Le lendemain, des forces considérables étaient rassemblées en face de Signénari. Le jeune guerrier comprit que la bataille qui allait s’engager était pour lui la dernière. Il fit le tour de son camp, exhortant ses soldats. Grave, plein de douceur, beau comme une femme, il parcourait les rangs, démontrant aux hommes attentifs le peu de valeur de la vie, ne leur cachant pas que l’issue de la journée c’était la mort ou le déshonneur. Il ajoutait qu’une mort glorieuse est enviable et que la vie d’un lâche ne vaut pas celle d’un chien.

Puis il rentra dans sa tente et expédia un messager à sa mère, il lui annonçait qu’il allait mourir et lui envoyait un riche poignard en souvenir de lui. Alors il s’approcha d’un miroir et versa des parfums sur ses cheveux, puis il posa sur sa tête son casque de corne noir, surmonté, au-dessus du front, par une lame de cuivre découpée en forme de croissant, il l’attacha sous son menton et coupa les bouts flottants des cordons de soie. Cela signifiait qu’il ne les dénouerait plus, qu’il se vouait à la mort. Si sa tête était portée au vainqueur, celui-ci comprendrait qu’il s’était fait tuer volontairement.

La bataille commença, ce fut Signénari qui attaqua ; il s’élança à la tête de ses soldats avec impétuosité. Le début de la lutte leur fut favorable, ils rompirent les rangs des ennemis, en massacrèrent un grand