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dant vers Hiéyas un vieux chef nommé Kiomassa, dont la prudence et le dévouement étaient connus.

— Qu’il aille à Mikava sous des apparences pacifiques, disait le prince et qu’il s’efforce de savoir si vraiment Hiéyas veut recommencer la guerre. Le mikado a ordonné de demeurer en paix ; le premier qui enfreindra son ordre encourra sa colère. Si la guerre est inévitable, que notre ennemi soit le premier coupable. Kiomassa possède justement un château dans les environs de Mikava ; il peut en se rendant dans ses domaines rendre visite à Hiéyas, sans éveiller de soupçon.

Le général Kiomassa était parti, emmenant avec lui trois mille hommes.

— Je viens te voir en voisin, dit-il à Hiéyas lorsqu’il fut au château de Mikava.

Hiéyas le reçut avec un sourire moqueur.

— Je t’ai toujours eu en grande estime, dit-il, et c’est un plaisir pour moi que le hasard t’ait conduit de ce côté. Je disais ce matin aux seigneurs de ma maison, en apprenant ton arrivée sur mes terres, que, hormis trois choses, je ne voyais rien à reprendre en toi.

— Et quelles sont ces trois choses ? dit Kiomassa.

— Premièrement, tu voyages avec une armée, ce qui est singulier en temps de paix ; deuxièmement, tu possèdes une forteresse qui semble menacer mes provinces ; troisièmement, enfin, tu laisses, contrairement à la mode, pousser ta barbe sous ton menton.

Kiomassa lui répondit sans paraître fâché :

— Je voyage avec une armée pour me préserver de tout danger, car je crois les routes peu sûres ; j’ai une forteresse naturellement pour loger cette armée. Quant à ma barbe, elle m’est très utile : lorsque j’at-