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— Tu te moques, disait la mère, les prêtres n’ont pas seulement terminé leur toilette.

Mais, néanmoins, elle s’avançait vers la façade et, perchée par-dessus la légère balustrade, regardait dans la rue.

Des courriers nus, moins un morceau d’étoffe, nouée autour de leurs reins, passent à toutes jambes, ayant sur l’épaule une tige de bambou, qui ploie à son extrémité sous le poids d’un paquet de lettres. Ils se dirigent vers la résidence du siogoun.

Devant les boutiques des barbiers la foule s’amasse ; les garçons ne peuvent suffire à raser tous les mentons, à coiffer toutes les têtes qui se présentent. Ceux qui attendent leur tour causent gaiement devant la porte. Quelques-uns sont déjà revêtus de leurs habits de fête, aux couleurs vives, couverts de broderies. D’autres, plus soigneux, nus jusqu’à la ceinture, préfèrent terminer leur toilette après leur coiffure achevée. Des marchands de légumes, de poissons, circulent, vantant à hauts cris leurs marchandises qu’ils portent dans deux baquets, suspendus à une traverse de bois, posée sur leur épaule.

De toutes parts on orne les maisons de banderoles, d’étoffés brodées, couvertes d’inscriptions chinoises en or sur des fonds noirs ou pourpres ; on accroche des lanternes, des branches fleuries.

À mesure que la matinée s’avance, les rues s’emplissent de plus en plus de gai tumulte ; les porteurs de norimonos, vêtus de légères tuniques, serrées à la taille, coiffés de larges chapeaux, pareils à des boucliers, crient pour se faire faire place. Des samouraïs passent à cheval, précédés d’un coureur qui, tête baissée, les bras en avant, fend la foule. Des groupes s’arrêtent pour causer, abrités sous de vastes parasols, et for-